
Contexte de l’étude
La température, moteur de la vie aquatique !
La température, comme la ressource en eau, est un paramètre essentiel au maintien de la vie sur Terre. Elle conditionne les processus biologiques vitaux et influence la répartition des espèces végétales et animales. Elle contribue également au maintien des grands équilibres environnementaux.
Dans les milieux aquatiques, son rôle est encore plus crucial. La température de l’eau façonne la qualité des habitats naturels, régule le cycle de vie des espèces et conditionne la dynamique des écosystèmes. Elle impacte directement la croissance, la reproduction et les migrations de nombreux organismes aquatiques et subaquatiques. Chez les poissons, par exemple, chaque espèce présente un « préférendum thermique », c’est-à-dire une plage de température optimale pour se développer, se reproduire ou migrer. Un écart de quelques degrés peut perturber leur cycle de vie et compromettre leur survie.
La température joue par ailleurs un rôle central dans la qualité physico-chimique de l’eau. Elle influence directement le taux d’oxygène dissous, essentiel à la survie des organismes aquatiques. Une eau trop chaude contient notamment moins d’oxygène, ce qui fragilise les milieux naturels et réduit leur capacité à accueillir la biodiversité.
Le changement climatique : les milieux aquatiques sous pression !
Aujourd’hui, les effets conjugués du changement climatique et des activités humaines sur les milieux aquatiques inquiètent de plus en plus les communautés scientifiques ainsi que les acteurs associatifs de la pêche de loisir. Chaque année, les sécheresses se multiplient et s’aggravent, tandis que les périodes d’étiage (faible débit) deviennent plus longues et plus sévères, affectant durablement la qualité écologique des cours d’eau et la biodiversité qui y habite.
Dans ce contexte, comprendre l’influence de la température et de la baisse des débits sur les milieux aquatiques est devenu un enjeu majeur pour anticiper les évolutions à venir et mettre en place des mesures de gestion efficaces, adaptées aux enjeux économiques et écologiques du bassin.
C’est dans ce contexte que la Fédération de l’Aube pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique a engagé, en 2022, le déploiement d’un vaste réseau de suivi thermique couvrant l’ensemble de son territoire.
Du plan départemental au réseau de suivi : une démarche structurée pour la protection des milieux aquatiques !
L’étude a débuté par la mise à jour du Plan Départemental pour la Protection des milieux aquatiques et la Gestion des ressources piscicoles (PDPG), officiellement publié le 28 octobre 2022.
Ce travail a permis d’identifier 48 contextes piscicoles sur le département, répartis en 27 contextes salmonicoles, 6 cyprinicoles et 16 intermédiaires. Pour chacun d’entre eux, une analyse approfondie des facteurs limitant la vie aquatique a été menée. Elle a notamment mis en évidence l’impact du recalibrage des cours d’eau, des ouvrages hydrauliques, des prélèvements pour l’irrigation et de l’abattage de la ripisylve sur l’évolution de la température de l’eau et des niveaux hydrologiques.
Dans une volonté d’aller plus loin, la fédération de pêche a mis en place un vaste réseau de suivi des températures et des niveaux d’eau au cours des années 2021 et 2022.
Objectifs de l’étude
Le suivi de la température de l’eau et des niveaux hydrologiques à l’échelle du département poursuit trois objectifs principaux :
● Analyser l’évolution des températures de l’eau dans le temps et évaluer leur impact sur la survie des poissons, en particulier les espèces repères les plus sensibles.
● Suivre le niveau hydrologique des cours d’eau les plus vulnérables aux phénomènes d’assecs, afin de promouvoir une gestion durable et raisonnée de la ressource en eau sur ces secteurs.
● Suivre l’évolution des enjeux localisés, notamment sur les sites devant faire (ou ayant fait) l’objet de travaux de restauration.
Descriptif de l’étude
Pour le déploiement et la gestion des réseaux de suivi de la température et des niveaux hydrologiques, la Fédération de l’Aube pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique a choisi de travailler en étroite collaboration avec les collectivités gémapiennes (syndicats de rivières) du territoire, très intéressées par ces données.
Cette mutualisation des moyens et des compétences a permis d’améliorer la qualité du suivi.
Les 2 réseaux ont été déployés autant que possible sur des stations de mesure existantes, afin de faciliter l’analyse croisée des paramètres étudiés. Un important travail de prospection de terrain et de recherche bibliographique a ainsi été réalisé pour identifier des stations représentatives des différents contextes hydrologiques, tout en optimisant leur localisation par rapport aux réseaux déjà en place.
Pour répondre aux objectifs fixés, 3 réseaux complémentaires ont été créés :
🌡️ Un réseau permanent de sondes de température (99 sondes)
Déployé de manière homogène sur l’ensemble des cours d’eau du département pour une durée minimale de 5 ans, ce réseau a été conçu en fonction :
– du linéaire des cours principaux et de leurs affluents,
– de leur appartenance à un domaine piscicole (salmonicole, intermédiaire ou cyprinicole),
– d’une analyse statistique visant à optimiser le nombre de sondes par tronçon.
🌊 Un réseau permanent de sondes de pression (16 sondes)
Parmi les 99 sondes déployées, 16 mesurent également la hauteur d’eau, sur des secteurs prioritaires en termes de quantité d’eau, identifiés dans le cadre du PDPG de l’Aube.
Ces sondes permettront de mieux quantifier la vulnérabilité des cours d’eau aux étiages sévères et aux assecs. Ces sondes mesurent aussi la température, contribuant ainsi au croisement des données.
📡 Un réseau de sondes mobiles (2 sondes)
Utilisées de manière ponctuelle, ces sondes sont déployées sur des tronçons présentant des enjeux spécifiques, comme des suivis avant/après travaux, la recherche de dysfonctionnements locaux ou des études ciblées complémentaires.
Leur temps de déploiement est variable et ajusté aux besoins de chaque mission.
Protocole d’installation des sondes
Les sondes thermiques ont été insérées dans des tubes en PVC de 15 à 25 cm de longueur (selon le type de sonde), puis fixées à un pieu métallique à l’aide de deux colliers de serrage. Un fil de fer, coulissant le long du pieu, permet de remonter facilement les sondes sans devoir démonter l’ensemble du dispositif.
Sur les secteurs sur lesquels la profondeur d’eau était insuffisante pour garantir une immersion correcte, le support racinaire disponible a fait office de point d’ancrage alternatif.
En parallèle, les sondes destinées à mesurer la pression atmosphérique (barométrique) ont été installées sur des arbres, à une hauteur d’environ 3 mètres, pour assurer une collecte de données fiable et de limiter les risques d’endommagement.

Sonde de température et de niveau d’eau U20-L1

Navette de décharge des données

Sonde thermique mise en place

Sonde de température TidbT v2
Résultats

Pour assurer la gestion et la valorisation des données collectées et bancarisées, un atlas des stations de mesures a été édité. Ce document facilite le repérage des sondes pour la récupération des données et permet également de tenir à jour un historique des interventions réalisées ainsi que des agents ayant participé aux opérations.
Parallèlement, une base de donnée est construite pour garantir un stockage sécurisé et une valorisation optimale des données collectées. À terme, des fiches bilan de la qualité thermique des contextes piscicoles pourront être rédigées sur la base de ces données.

Sonde fixe immergée

Site d’implantation d’une sonde fixe
Perspectives
À terme, les données récoltées permettront de constituer des chroniques sur plusieurs années, essentielles pour suivre l’évolution des conditions thermiques des cours d’eau.
📊 Des cartographies de la qualité thermique pourront ainsi être réalisées, révélant les secteurs les plus vulnérables ou les plus altérés.
🎯 Les données recueillies permettront de cibler les zones à enjeux et de prioriser les actions de restauration les plus pertinentes pour préserver les milieux aquatiques.
Le montant total du projet s’élève à 115 600 €. Il a été financé à 65 % par l’Agence de l’eau Seine Normandie, à 19 % par la Fédération Nationale de la Pêche en France et à 16 % par la Fédération de l’Aube pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique.